Sur la piste des joggeuses en abaya d’Arabie saoudite

Des joggeuses affiliées au mouvement Yalla Run | © Facebook @ Jeddah Running Collective
Elles s’appellent Sarah, Michelle ou Zahra. Expats ou locales, elles se réunissent à intervalles réguliers pour parcourir en courant les rues de Riyadh, abayas au vent. Une initiative qui fait autant de bien au corps qu’à l’esprit et qui témoigne de changements dans la perception des femmes d’Arabie Saoudite.
« Yalla, yalla ! ». L’exclamation, qui signifie « allons-y », est répandue dans le monde arabe, où elle résonne aux oreilles des touristes enchantés qui s’empressent de la répéter. Pour un nombre grandissant de femmes d’Arabie Saoudite, l’expression a pris depuis quelques années un autre sens, devenant synonyme d’émancipation. En 2013, la ville de Jeddah a en effet été le berceau de Yalla Run, un collectif qui compte désormais des équipes de course dans quatre villes du pays. Et fait exceptionnel pour un royaume où la séparation entre les sexes règne toujours en maître, le Jeddah Running Collective, pionnier de la course urbaine en Arabie Saoudite, a fait d’emblée le pari de la mixité.
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Hérésie ? Si hommes et femmes enchaînent les foulées de concert, pas question toutefois de céder à la chaleur et de courir en brassière et mini short. Pour les femmes, l’abaya est de rigueur, ce qui ne les empêche nullement de s’adonner à la course à pied. La preuve : depuis 2013, un club cette fois exclusivement féminin a vu le jour à Riyadh, où Saoudiennes et expats se côtoient deux fois par semaine pour parcourir à petites foulées les rues de la ville. Une initiative qui agit autant sur la silhouette que sur le mental, l’objectif étant d’entraîner les participantes à prendre part à des courses.

Entre citations inspirationnelles et portraits filtrés, l’Instagram du collectif est une fenêtre virtuelle sur le projet, et de manière plus générale, sur les changements qui se mettent en place dans le pays en ce qui concerne la condition des femmes. Sous l’impulsion du prince héritier Mohamed ben Salmane, le pays entre en effet lentement mais sûrement dans la modernité, avec la fin de l’interdiction des cinémas, considérés autrefois comme l’antre du pêché, mais aussi l’autorisation pour les femmes de conduire des voitures. Signe d’une nouvelle tendance à l’ouverture : l’Arabie Saoudite a accueilli cette semaine sa première Fashion Week, réservée exclusivement aux femmes.
La course au changement
Rassemblés par Mohamed ben Salmane dans son plan « Vision 2030 »; les changements se multiplient en Arabie Saoudite, et les femmes gagnent progressivement une place plus égalitaire au sein de la société civile. Même si le chemin reste encore long à parcourir. Alors pour que ça aille plus vite, les joggeuses de Riyadh, elles, font la route en courant, en attendant le jour où elles seront enfin considérées comme les égales de leurs concitoyens masculins.