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Les ânes d’Afrique, nouvelles victimes de la médecine chinoise

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Chaque année, la Chine sacrifie des millions d'ânes pour fabriquer l'ejiao. | © AFP PHOTO / Yasuyoshi CHIBA

Environnement & Animaux

Destinées à la fabrication d’un remède traditionnel, les peaux d’ânes sont très prisées en Chine. Face à la pénurie d’ânes dans leur pays, les industriels chinois se tournent de plus en plus vers les pays africains où les ânes risquent dorénavant de disparaître.

Après le trafic d’ivoire et de cornes de rhinocéros, c’est au tour des ânes d’Afrique d’être la nouvelle cible des consommateurs chinois. La raison est bien simple. Outre leur viande prisée par les Chinois, leur peau est un élément indispensable dans la fabrication d’un remède traditionnel prétendument miracle : l’ejiao.

Utilisé depuis plus de 2 500 ans, ce médicament, obtenu en faisant bouillir la peau d’âne pour en récupérer la gélatine, permettrait selon la tradition chinoise de tonifier le sang dans le traitement d’affections telles que l’anémie. Pratiquement disparu, l’ejiao a acquis une nouvelle image dans les années 90 lorsqu’il est devenu un véritable produit de consommation basique. Dans des boissons, dans des crèmes pour le visage ou encore dans des bonbons, l’ejiao est partout.

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Trafic illégal

Victime de ce regain de popularité, la population d’ânes en Chine a drastiquement diminué depuis les années 90 : ils sont passés de 11 millions à moins de 6 millions. Et la valeur de leur peau a rapidement explosé : jusqu’à environ 340 euros par peau, selon National Geographic.

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Plusieurs pays africains ont interdit l’exportation de peaux d’ânes et ordonné la fermeture d’abattoirs. D’autres fonctionnent toujours à grande échelle. © AFP PHOTO / TONY KARUMBA

Face à cette pénurie, les industriels chinois se tournent de plus en plus vers les pays africains comme le Kenya ou le Niger, où les ânes sont bons marchés et présents en grande quantité. De l’histoire ancienne ? Entre 2012 et 2016, le prix moyen d’un âne au Niger est passé de 29 euros à 122 euros. Une augmentation qui empêche les agriculteurs pour qui les ânes étaient des bêtes de somme de s’en procurer.

Menacés de disparition

Mais cette inflation soudaine n’est pas la seule conséquence de ce trafic d’ânes. Il met également en danger la population de cet animal en Afrique. « Pour satisfaire l’appétit du marché chinois, il faudrait sacrifier jusqu’à 10 millions d’individus par an, alors qu’il n’en existe que 44 millions sur la planète…», analyse France 24 qui a récemment réalisé une enquête en Chine et au Kenya.

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Dans cet abattoir agréé situé au Kenya, des ouvriers tiennent des peaux d’ânes non traitées. © AFP PHOTO / TONY KARUMBA

Face à cette menace de disparition, plusieurs pays, comme le Niger ou le Botswana, ont interdit l’exportation de peaux d’ânes et d’autres ont ordonné la fermeture des abattoirs d’ânes. Mais ces mesures n’ont fait que favoriser le commerce clandestin. « Tous les pays ayant pris des mesures se retrouvent confrontés à des exportations illégales ou non réglementées massives », déplore au National Geographic Alex Mayers, employé chez Donkey Sanctuary, un groupe de protection basé au Royaume-Uni. « La créativité ne manque pas lorsqu’il s’agit de s’approvisionner ».

Depuis 2016, trois abattoirs appartenant à des Chinois ont ouvert au Kenya, d’après France 24, et chaque année des dizaines de milliers d’ânes y sont tués avant d’être envoyés en Chine. Les organisations de défense des animaux tirent la sonnette d’alarme : à ce rythme, d’ici six ans, l’âne pourrait disparaître du pays.

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