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Détournement à la FN Herstal : désastreux pour la Wallonie !

Willy Borsus et Elio Di Rupo face à la catastrophe. « Nous sommes en train de remettre de l’ordre à tous les étages de la Maison FN Herstal », assure le ministre wallon de l’Economie. | © DR

Politique

Et encore une « affaire », une ! Avec une question accablante à la clé : comment un seul homme peut-il détourner 15 millions d’euros en seulement quelques années ?


Par Martin Buxant

Fleuron industriel wallon, la Fabrique nationale de Herstal connaît aujourd’hui des heures très compliquées. En résumé, on pourrait dire que ça y flingue tous azimuts, ce qui est particulier pour une société où l’on fabrique des armes.

Pour rappel, la FN Herstal est un leader mondial en fabrication et vente d’armement. Elle appartient à 100 % au gouvernement wallon qui la gère via Wallonie Entreprendre, son bras financier. Or il est apparu il y a quelques jours que la mauvaise gestion des anciennes équipes dirigeantes avaient permis à un cadre de l’entreprise de détourner non pas un ou deux millions, mais – accrochez-vous – 15 millions d’euros en l’espace de plusieurs années !

Ce cadre est aujourd’hui en fuite. Pour l’anecdote, on notera qu’il était également agent de joueurs et arrivait chaque jour en Porsche rouge au travail. Avouez que pour passer inaperçu, il y a mieux. Mais même en n’étant pas discret, il n’a pas eu à s’inquiéter, tant les procédures d’encadrement et d’audit étaient défaillantes.

Tout cela fait évidemment très mauvais genre pour une entreprise active dans un secteur très sensible, où les informations sont censées être cadenassées et confidentielles. Comment expliquer par exemple à l’armée américaine à laquelle vous voulez vendre des armes que vous êtes crédible si votre responsable des ventes s’est fait la malle avec 15 millions d’euros… et qu’il était agent de joueurs de football à mi-temps ?

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La Région wallonne tente maintenant de nettoyer tout cela au plus vite et de mettre la poussière sous le tapis. Ça fait désordre, et les amis flamands nous regardent, surtout au lendemain des déclarations de Paul Magnette, qui leur a rappelé qu’on aimait profiter de la vie et se la couler douce. Elle tente donc de mettre de l’ordre et de nettoyer le conseil d’administration de l’entreprise qui, bien sûr, est politisé. Le hic, c’est que sur les trois administrateurs qu’elle entend liquider pour n’avoir pas pu empêcher la fraude, l’un d’entre eux, le MR Laurent Levaux, refuse de démissionner et veut s’expliquer devant les ministres Borsus et Di Rupo. La saga n’est pas finie et ça va encore faire beaucoup de bruit.

Que de regrets, alors que l’image de l’entreprise s’était nettement améliorée ces derniers temps ! Bien reprise en main récemment par un nouveau CEO, Julien Compère, la FN Herstal, logée au cœur de la commune du même nom, avec le soutien des autorités locales et du bourgmestre Daerden, avait réussi à donner une image positive de l’entreprise, notamment en accompagnant les besoins ukrainiens pour la guerre contre la Russie. Tout ou presque est maintenant à recommencer. Et comme un malheur ne vient jamais seul, on découvre aujourd’hui que la même FN a perdu (en plus des 15 millions d’euros) 23 millions dans des produits financiers. Les structures d’audit et de contrôle n’ont, semble-t-il, pasrelevé cette mauvaise gestion durant des années… Désastreux pour l’image de la Wallonie.

 

 

 

Allez expliquer aux Américains à qui vous voulez vendre des armes que votre responsable des ventes s’est fait la malle avec 15 millions d’euros… et qu’il était agent de joueurs de football à mi-temps

Martin Buxant cash : « Ça fait désordre et les amis flamands nous regardent. »
La FN Herstal : une sale affaire qui tombe mal.

PAS D’AVEU DE CULPABILITE
Cité par La Libre Belgique, Laurent Levaux a clairement affirmé sa position : « Mes compétences, mon investissement et – surtout – mon intégrité n’ont jamais été mises en cause et il n’est pas question, aujourd’hui, de céder le flanc à ceux qui souhaitent juste faire tomber des têtes. Je m’étonne qu’après avoir mis autant d’énergie à remettre Nethys en conformité sur le plan éthique et à récupérer, avec son conseil d’administration et son management, plus d’un milliard et demi d’euros, on me demande aujourd’hui de faire un pas de côté – ce qui serait considéré comme un aveu de culpabilité. Si le but est de décourager des industriels entrepreneurs en charge de grandes entreprises et qui font le choix de s’investir pour aider la Région wallonne, continuons comme cela. »
SI CE N’EST PAS UN CAMOUFLET, ÇA Y RESSEMBLE
Que retenir de la visite de Volodymir Zelensky en Belgique ? Un nombre important d’observateurs n’ont pas manqué de relever que le leader ukrainien a entamé sa tournée européenne par Londres. On ne suivra pas certains qui, sur les antennes de LN24, parlaient d’un doigt d’honneur à l’Union européenne. Il n’empêche : si ce n’est pas un camouflet, ça y ressemble. Alors que l’ensemble de la Commission européenne et le président du Conseil Charles Michel se sont encore déplacés la semaine dernière à Kiev, Zelensky, lui, a d’abord serré la main du Premier ministre britannique.
C’est symbolique : cela veut dire que l’Ukraine compte d’abord sur les États-Unis, ensuite sur les Britanniques, enfin sur les Européens pour assurer sa survie. Comme dans une tentative de rattrapage, Zelensky a fait le déplacement jusqu’à Paris, et il n’y a qu’à voir la mine un peu déconfite du président Macron lorsqu’il pose en photo aux côtés du président ukrainien sur le perron de l’Élysée pour comprendre qu’il n’apprécie qu’assez modérément la séquence.
L’Europe ne doit qu’à elle-même le fait qu’elle arrive en dernière place dans l’ordre des visites ukrainiennes. Incapable de se réformer, pataugeant dans ses propres luttes interinstitutionnelles pour savoir qui du Conseil, de la Commission ou du Parlement doit serrer la pince de Zelensky en premier, elle finit sur la dernière marche du podium. Elle ne peut pas se plaindre.
Ceci dit, la visite était importante parce qu’elle personnifie et incarne tous les efforts que les Européens fournissent depuis un an pour venir en aide aux Ukrainiens, et humanise – là, je force le trait – les hausses des factures de gaz et d’électricité. Elle a aussi mis en évidence l’attente des Ukrainiens concernant l’envoi d’avions de chasse et le fait que l’Europe freine des quatre fers, afin de ne pas voir le conflit prendre une dimension mondiale. MB
L’Europe ne peut pas se plaindre

Reçu au Palais royal à Bruxelles ce jeudi 9 février, Volodymyr Zelensky a offert au roi Philippe un cadeau hors norme : un fragment d’avion russe SU25 abattu en Ukraine. Les pilotes ukrainiens y ont écrit : « Together we win ».

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