La campagne contre le harcèlement de rue qui met enfin tout le monde d’accord
La ville de Lausanne est à l’origine d’une campagne contre le harcèlement de rue qui frappe juste et fort là où les tentatives parisiennes et bruxelloises visaient à côté.
« Le comportement primitif du harcèlement de rue peut prendre diverses formes : la main aux fesses, ce grand classique, la caresse dans les cheveux non-sollicitée, l’insulte… Toutes ces choses qui rappellent ce harcèlement d’époque qui était exercé sur la voie publique ». La visite vient de commencer, et le guide passe devant trois œuvres remarquables d’une ère révolue, celle où les femmes, pour la plupart, étaient victimes des invasions masculines dans l’espace publique. Le musée a ouvert il y a peu et le commentaire se poursuit autour d’œuvres toutes aussi étonnantes les unes que les autres : la toile du « non-consentement constructiviste », la structure immersive dédiée aux insultes urbaines, les sculptures des aveugles du métro et bien sûr, le « joyau de malaisance » du lieu : le Jocon, « qui doit sa renommée à son regard qui ne semble jamais quitter sa proie ». Soit l’ultime traduction artistique de comportements heureusement figés dans le passé.
Lire aussi > Harcèlement de rue : 5 conseils pour réagir, à destination des hommes
Sauf que le Musée du harcèlement de rue, le MdHR pour les amoureux de l’art, n’est pas ouvert. Pire, il n’existe que dans l’imagination fertile de la ville de Lausanne, en Suisse. Sa vidéo de présentation n’est autre que la dernière campagne en date contre le harcèlement urbain. Une nouvelle addition aux tentatives relativement infructueuses de sensibilisation de la RATP parisienne et de la STIB bruxelloise, qui cette fois-ci, se démarque par sa justesse teintée d’un sarcasme bienvenu.


Contrairement à la campagne française, qui remplaçait les agresseurs par des prédateurs, et celle de l’ASBL « Touche pas à ma pote » qui ne les montrait tout simplement pas, l’initiative suisse parvient en quelques minutes à développer son concept avec un humour qui frappe juste : Lausanne met un visage – même de cire – sur l’agresseur, de manière à le rendre palpable pour la société suisse. En mars dernier, Sophie Guiron du collectif français « Les mots tuent » expliquait à ce propos en mars sur Twitter : « Le problème de la métaphore animalière pour représenter le harcèlement c’est qu’aucun homme ne va se reconnaître. Et qu’encore une fois on élude le fait que les agresseurs sont des hommes quelconques, pas des monstres ou des animaux, soumis à des pulsions incontrôlables ».
Lire aussi > Viols, harcèlements, agressions sexuelles : des Japonaises sortent du silence
Et le MdHR réussit la prouesse d’interpeller en quelques secondes tous les acteurs du harcèlement de rue : ceux qui en sont les coupables, des hommes injurieux de sexisme, d’homophobie ou de racisme, et les témoins impassibles de scènes de violence du quotidien – qui pourraient ne plus en faire partie, à en croire le Musée. Pour une fois, ses victimes n’en sont pas le focus principal, mais les cobayes forcément choqués d’un dispositif social aussi poussiérieux qu’une vieille toile sans intérêt artistique.