Les femmes noires font (enfin) les couvertures de magazines

Les femmes noires, (enfin) stars des couvertures des magazines de septembre | © Clarke Sanders / Unsplash
De nombreux magazines ont mis à l’honneur des femmes noires pour le mois de septembre. Des numéros historiques, qui mettent à mal le mythe selon lequel de telles couvertures font baisser les ventes.
« Quand j’ai commencé, il y a 21 ans, on m’a dit qu’il était compliqué pour moi d’apparaître sur les couvertures de magazines car les personnes noires ne faisaient pas vendre », raconte la chanteuse Beyoncé dans les pages du Vogue américain de septembre prochain. Historique, la Une de Queen B est également la première des 125 ans d’existence du magazine à être réalisée par un photographe noir, Tyler Mitchell.
Ce mois-ci, les actrices et mannequins noires s’affichent, une fois n’est pas coutume, en couverture des magazines de mode. Rihanna devient ainsi la première femme noire à faire la couverture de septembre du Vogue anglais. Les actrices Zendaya et Tiffany Haddish joueront respectivement les cover girls pour les éditions américaines de Marie Claire et Glamour. Lupita Nyong’o fera quant à elle la une de Porter.
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Le choix du numéro du prestigieux « september issue » n’est pas anodin. Septembre est le mois le plus important pour les magazines en termes de publicité. C’est aussi le numéro qui contient le plus de mode et donne le ton pour les tendances de l’année à venir. Autrement dit, il est primordial pour les magazines que ce numéro se vende. Voir tant de femmes noires en couverture est donc la preuve d’un véritable changement dans l’industrie?
Le mythe selon lequel les femmes noires ne vendent pas de magazines a été maintenu pendant des décennies. En novembre dernier, Alexandra Shulman, ancienne rédactrice en chef du Vogue britannique, a expliqué à The Guardian pourquoi seulement huit femmes noires avait fait la couverture du magazine au cours de ses 25 années d’expérience: « Les gens doivent reconnaître la personne que vous mettez sur la couverture » Elle a déclaré que « si elle mettait un visage noir sur la couverture qui n’était pas immédiatement reconnaissable » le magazine « vendrait moins de copies. C’est aussi simple que ça. »
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Mais est-ce vraiment le cas? Pas vraiment selon Charles Whitaker, professeur à la Medill School of Journalism de la Northwestern University : « Vous voulez des personnes avec lesquelles le public s’identifie, qui sont tendances. Ces femmes sont toutes très ancrées dans la culture en ce moment. Il est donc logique que les magazines les souhaitent sur leurs couvertures. » Et il semble que l’industrie réalise enfin tout cela : septembre 2018 pourrait voir un nombre record de femmes noires en couverture des magazines de mode.
L’importance des représentations
Dans un article publié sur le site de CNN, la journaliste Lisa Respers France se demande s’il s’agit d’un “Wakanda effect”, en référence au royaume fictif du blockbuster Black Panther. « Ces couvertures ont été accueillies avec beaucoup d’excitation sur les réseaux sociaux », écrit la journaliste. « Mais cette abondance de couvertures à un moment où les Etats-Unis semblent, pour beaucoup, plus divisés que jamais sur les questions de race, a déclenché encore plus d’applaudissements ». La journaliste rappelle aussi l‘importance des représentations.
Black women and September magazine covers go together. Look at beauty. pic.twitter.com/isupKFsfb6
— Wanna (@WannasWorld) August 7, 2018
Maiysha Kay, la rédactrice en chef du magazine The Glow Up, encourage à dépasser la simple célébration. Elle invite à acheter ces numéros pour soutenir les magazines qui mettent des femmes noires en couverture : « Personnellement, j’achète toutes les couvertures noires d’un magazine que j’ai vu, car on m’a dit que nous n’étions pas commercialisables. Nous avons déjà prouvé que nous pouvons battre les records du box-office, faire balancer les audiences à la télévision et faire de l’un des plus grands festivals de musique du monde le plus grand événement de l’année, grâce à sa première femme de couleur en tête d’affiche» explique-t-elle en référence au show de Beyoncé à Coachella.
Mais pour la rédactrice en chef, le combat contre les discriminations va plus loin qu’une visibilité et une affaire de tendance de la mode et de la beauté. «Nous sommes inspirants. Nous aussi nous sommes à la mode. Nous sommes beaux » conclut-elle.