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Congé de paternité : La Belgique est loin d’être avant-gardiste

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Le plat pays est encore loin derrière certains pays européens. | © Janko Ferlic

Société

En Belgique, les nouveaux pères ont droit à dix jours congé de paternité. Et les indépendants et demandeurs d’emploi n’y ont pas droit. Selon un baromètre de la Ligue des Familles, 60 % des papas souhaitent obtenir autant de jours de congés de paternité que les mères.

 

Les 5 000 personnes défilant dans les rues de Bruxelles contre les violences envers les femmes la preuve le dimanche 25 novembre en étaient la preuve : en matière d’égalité des genres, en Belgique aussi, il y a du boulot. Ce jeudi 22 novembre, la Chambre émettait des propositions visant à plus d’égalité de genre sur le lieu de travail. Parmi celles-ci, une recommandation a fait rugir l’opposition. Elle comprenait  »juste » une proposition de campagne d’encouragement envers les pères, afin qu’ils réclament un congé parental. Un geste qui manque d’ambition et de fermeté pour la députée verte Sarah Shlitz, réclamant 15 jours de congé de paternité obligatoire. Aujourd’hui, les pères ont droit à 10 jours. Mais près de 32% de ceux-ci ne les prennent pas. Dans un récent baromètre, La Ligue des Famille a constaté que des freins continuaient d’empêcher les pères de réclamer plus de congés après la naissance d’un enfant. Parmi ceux-ci, l’impact que ces derniers auront sur leur carrière. 

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Clé de l’égalité

Si l’allongement du congé de paternité est reconnu comme un facteur important pour l’égalité hommes-femmes, c’est tout d’abord parce qu’il limite la discrimination à l’emploi liée à la maternité.  « Tout le temps que les mères passent auprès de leurs enfants à prodiguer soins et éducation, c’est du temps qu’elles ne passent pas dans la sphère professionnelle. Si la société ne permet pas aux pères d’être davantage présents dans le foyer, alors il est clair qu’il subsistera toujours des inégalités à l’embauche avec la fameuse phrase ‘vous comptez avoir des enfants plus tard ?’…  » explique Alicia Novis, chargée de mission au sein de l’ONG féministe Le Monde selon les femmes. Selon la Ligue des Familles, l’allongement du congé de paternité permettrait également une paternité plus épanouie, une répartition plus égale des soins aux enfants et des tâches ménagères au sein des couple. « Quand on sait ce qu’est une naissance et le chamboulement physique et émotionnel que ça provoque, dix jours de congé de paternité est totalement insuffisant. La mère accouche mails il y a tout l’aspect du CARE à prendre en compte à côté : la gestion du ménage, des courses, de l’éducation des autres enfants s’il y en a déjà, des rendez-vous médicaux…», ajoute Alicia Novis.

Latte papa
© Tina Bo / Unsplash

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La Belgique à la traîne

« Les politiques menées par ce Gouvernement fédéral continuent de fragiliser et discriminer les femmes, en termes de carrières (…) », s’est insurgée Sarah Shlitz en novembre, sur le site du parti Ecolo. Plus nuancée, Alicia Novis estime que « La Belgique n’est effectivement pas dans les pays avant-gardistes concernant les droits de congé parentaux, cependant les lois avancent peu à peu et dernièrement un pas en avant a été fait en actualisant et en flexibilisant la loi sur le congé parental en septembre 2018″.

Pourtant, hommes réclament plus de temps auprès de leur nourrisson :  « On assiste à une évolution de la figure du père, de la conception qu’on se fait de ce que c’est d’être un bon père. On sort de la figure dominante du père chef de famille qui assure le revenu familial et incarne l’autorité. Être père aujourd’hui, c’est aussi être disponible et présent pour ses enfants. L’action de materner n’est plus exclusivement réservée aux femmes », explique Bernard Fusulier, sociologue à l’université catholique de Louvain interrogé par Le Soir. Alicia Novis ajoute : « Il est clair qu’une demande émane de leur (les hommes, ndlr) part quant à leur implication dans la sphère familiale et privée. Même si certains évoquent le niveau individuel comme argument pour répondre à ce projet de loi, il est important de revenir au niveau institutionnel et la société est responsable de créer un environnement dans lequel hommes et femmes peuvent évoluer de manière égalitaire. Nous devons toutes et tous impulser le changement, mais c’est elle qui doit le soutenir ». 

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Congé parental
© Picsea / Unsplash

Selon un récent baromètre de La Ligue des Familles, 67 % des hommes de 18-44 ans soutiennent la proposition d’un congé de paternité allongé à 15 semaines (équivalent au congé de maternité). Delphine Chabbert, secrétaire politique de la Ligue des Familles, propose différentes étapes pour y parvenir : rendre le congé de paternité (de dix jours) obligatoire, le rendre accessible aux indépendants et aux demandeurs d’emploi, qui n’y ont actuellement pas droit. Puis l’allonger progressivement.

Le plat pays est en outre encore loin derrière certains pays européens. L’Espagne vient par exemple d’adopter un congé de paternité de seize semaines.  En Suède, des discussions sont en cours sur l’allongement le congé de paternité de trois à cinq mois. Dans le pays scandinave, on parle même d’une invasion de « latte papas », des pères modernes qui arborent fièrement leur porte-bébé kangourou et envahissent les aires de jeux et les cafés.

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