Cancer de la peau : En Europe, les Belges se protègent le moins du soleil

Comme une mie de pain, notre peau peut griller très vite. | © D.R.
Les cancers de la peau sont les cancers les plus fréquents en Europe. Et dès que les températures estivales pointent leur nez, bien que 93% des Belges sont conscients du danger du « trop de soleil », ils sont juste 6% à se protéger.
Début mai, lors de sa campagne anuelle contre le cancer de la peau, l’ASBL Euromelanoma alerte : les Belges ignorent les conseils de protection face au soleil. Et la Belgique obtient un score général bien plus faible que la moyenne européenne. Selon une étude réalisée par La Roche Posay et Ipsos auprès de 13 561 Européens âgés de 15 à 65 ans, dans 17 pays européens, il y a 32 000 nouveaux cas de mélanomes détectés par an.
93% des citoyens belges connaissent les dangers du soleil sur la santé. Et pourtant, ils ne protègent pas assuez leu peau. Dans un communiqué, le dermatologue Thomas Maselis, président d’Euromelanoma Belgique explique : « seuls 14 % des Européens se protègent contre le soleil tout au long de l’année. Nous, les Belges, sommes encore plus mauvais élèves avec uniquement 6% des gens qui se protègent ».
La Belgique, mauvaise élève en Europe
Dès qu’il fait chaud, 66% des Belges appliquent de la crème solaire sur les parties de leur corps exposées au soleil, 63% portent des lunettes de soleil avec filtre UV, et 60% utilisent une protection solaire pour le visage, 39 % essaient de rester à l’ombre et 32 % portent un chapeau ou une casquette. Des chiffres inquiétants. Surtout que seuls 7% portent des vêtements de protection (tissu ou textile filtrant un maximum d’UV, manches longues…), alors que la moyenne européenne est de 16%.
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Toujours en Belgique, selon les chiffres du Registre du Cancer, en 2014, 1 193 nouveaux cas de cancer de la peau ont été enregistrés.

Le docteur Anny Cohen-Letessier, dermatologue libérale, ancienne attachée de consultation à l’hôpital Saint-Louis à Paris, répond aux questions de Paris Match
Paris Match : Les récentes journées de dépistage gratuit des cancers de la peau ont actualisé un fléau redoutable : le mélanome. Quelles sont les caractéristiques qui doivent nous alerter et conduire à consulter ?
Dr Anny Cohen-Letessier : Nous devons être attentifs à un “grain de beauté” de pigmentation essentiellement marron, à bord asymétrique, irrégulier, de couleur inhomogène et souvent d’un diamètre supérieur à 6 millimètres. Ces tumeurs plates ou en relief ont la caractéristique d’être évolutives.
Pourquoi le mélanome fait-il si peur ?
Parce que, s’il n’est pas détecté précocement, il peut mettre notre vie en danger. Ce cancer de la peau très dangereux peut métastaser et envahir d’autres organes. En cas de suspicion d’un mélanome, on fait pratiquer une ablation chirurgicale de la lésion suspecte par un chirurgien dermatologue ou par un chirurgien plasticien. La tumeur sera analysée et, selon les cas, il y aura reprise chirurgicale ou non, avec, si besoin, consultation chez un cancérologue.
Il faut éviter toute exposition solaire avant l’âge de 3 ans.
Ces dangereux cancers sont-ils toujours des grains de beauté qui dégénèrent ?
Non. Un tiers seulement des mélanomes apparaissent sur un grain de beauté et les deux autres tiers sur une peau saine. Dans 70% des cas, c’est une exposition solaire intense et intermittente qui en est responsable, surtout si elle a débuté dès l’enfance et l’adolescence. Il faut éviter toute exposition avant l’âge de 3 ans.
« La peau a de la mémoire : elle enregistre toutes les agressions subies depuis la petite enfance »
Comment les ultraviolets parviennent-ils à provoquer de tels dégâts ?
Ils déclenchent des altérations au cœur de nos cellules en endommageant notre ADN, qui n’aura plus la capacité de se réparer. On parle alors de “capital solaire épuisé”. La peau a de la mémoire : elle enregistre toutes les agressions subies depuis la petite enfance.
Y a-t-il des sujets risquant particulièrement de développer un mélanome ?
Il y a différents phototypes plus ou moins à risque : 1. Les personnes à la peau claire et aux yeux clairs (les plus exposées). 2. Les peaux à nombreux grains de beauté (plus de 50). 3. Les sujets aux antécédents familiaux (facteurs génétiques). 4. Les peaux ayant subi des coups de soleil répétés avant l’âge de 15 ans. 5. Les sujets immunodéprimés ou sous immunodépresseurs.
Rassurez-nous, bien d’autres taches ne sont pas des mélanomes ?
Bien sûr, mais certaines peuvent être des carcinomes, cancers de la peau beaucoup moins dangereux car restant toujours à un stade localisé, les basocellulaires. Il sont de trois types : superficiels, nodulaires et sclérodermiformes. D’autres taches, tout à fait bénignes, ne doivent pas non plus inquiéter mais doivent tout de même être surveillées par un dermatologue. Parmi les plus fréquentes, les taches actiniques, “anciennement nommées taches de vieillesse”, brunes à bord régulier, plates et de couleur homogène….
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À quel moment faut-il faire pratiquer un bilan complet de sa peau chez un dermatologue ?
Toute personne ayant de nombreux grains de beauté devrait faire effectuer un bilan de sa peau une fois par an. C’est à cet effet que le Syndicat des dermatologues organise depuis une dizaine d’années des journées de dépistage gratuit, les “melanome days”. À mon avis, mieux vaut faire un check-up au milieu de l’hiver pour avoir une cartographie complète et un autre au retour de vacances au soleil.
Comment vérifier soi-même les taches de notre corps susceptibles de dégénérer ?
À la maison, on se tient debout devant un miroir bras levés de face et de dos en regardant attentivement bras, avant-bras, jambes, fesses et bas du dos. Il faut examiner la paume de ses mains, la plante des pieds et tous ses ongles (il peut y avoir des mélanomes même sous les ongles et entre les orteils). On n’y pense pas souvent, mais les taches des parties génitales risquent aussi d’être des mélanomes et nécessitent d’être surveillées attentivement. Cet auto-examen va permettre d’une part de se familiariser avec ses grains de beauté et, d’autre part, de repérer une nouvelle lésion.